Mon fils à moi de Martial Fougeron / by herwannperrin

Un film coup de coeur sur un sujet des plus difficile, sensible et peu abordé: la maltraitance.

Avec une actrice phare, c'est Nathalie Baye, très très loin de Vénus Beauté avec à ses côtés dans un rôle d'effacement complet Olivier Gourmet en père résigné qui refuse de voir ce qui se passe, qui est dans l'attente enfin même pas, il est dans le no man's land de la vie, enfermé dans son travail, ses livres et sa vie grise et sans avenir

Victor Sévaux, c'est Julien le fils de sa mère (Nathalie Baye), un fils particulier qui a plusieurs vies; l'une ébouriffée à l'école avec Alice sa petite chérie, il a entre 12 et 14 ans, les petits flirts de son âge et la douceur de sa grand-mère maternelle avec qui il fait du piano un peu funky et puis il y a la maison avec sa mère bizarre, il est bien peigné, sage, a des résultats scolaires honorables mais tout bascule quand alice lui envoie une lettre et que sa mère l'intercepte, son fils chéri est en train de grandir, elle ne comprend pas et puis on veut lui enlever; il ne sera bientôt plus là...

Tout se dérègle et la mère possessive devient une mère insupportable qui entretient avec son fils une relation étrange et malsaine, elle le veut pour elle, uniquement pour elle; finis les sorties, les rencontres avec les copains, la scène du choix entre "faire une piscine avec sa mère où jouer au foot avec ses copains" est un de ces moments où la vie tangue du mauvais côté... Petit à petit la vie de Julien se détériore de manière presque imperceptible de l'extérieur mais de l'intérieur, tout se sait, la soeur veut que son père rompe le silence dans lequel il est muré, qu'il fasse face à sa femme, cela n'arrivera qu'une fois et pour combien de temps..., c'est vrai qu'il a un vie bourgeoise, certes mais tellement étriqué que l'on arrive même pas à croire qu'il puisse être véritablement professeur d'université, il manque de grandeur, cette grandeur d'âme ...

Alors côté maltraitance eh bien il ne s'agit pas simplement de la maltraitance physique qui se caractérise par des coups, des violences sur le corps, ... là c'est beaucoup plus insidieux et on le voit bien dans l'appel désespéré de Julien à la police, appel qui précède le drame, la police vérifie, fait son boulot mais dans la mesure où c'est de maltraitance psychique dont il est question, c'est beaucoup plus difficile à détecter (plus de piano, plus de chambre, autorisation de rentrer et de sortir de sa chambre, rupture des liens avec ses amis de classe, plus de sport,...) C'est à de l'enfermement psychologique que Julien est soumis, il ne lui restera plus qu'une seule solution devant cette incompréhension absolu de son entourage...

Dans le journal Le Monde du 7 mars dernier, on peut lire de Jean-Luc Douin et Jacques Mandelbaum les difficultés liées au financement de ce type de film, un itinéraire  quelque peu complexe : "Venu de la mise en scène de théâtre, Martial Fougeron a commencé à réaliser des courts métrages en 1997. C'est l'un d'entre eux qui détermine, en 2003, une rencontre déterminante pour le cinéaste, celle d'Elisabeth Depardieu, qui le fait entrer à Emergence, une université d'été dont elle assure la direction artistique et qui permet aux réalisateurs débutants de préparer leur premier long métrage. C'est encore elle qui intercède auprès de l'actrice principale pour le rôle très noir de mère pathogène dans Mon fils à moi : « Nathalie Baye, j'en rêvais, dit Fougeron, mais je ne voulais pas y croire. C'était l'idéal, ce méla nge de douceur et d'une violence à contre-emploi. Elisabeth lui a envoyé le script. Nathalie Baye m'a appelé elle-même pour me dire oui. Avec elle, le montage financier du film est devenu plus facile, même s'il a fallu s'accrocher. Elle est venue le défendre elle-même à France 2 avec son agent, Dominique Besnehard. Mais à l'époque, France 2 n'y croyait pas. Ils trouvaient le sujet difficile, avec ou sans Nathalie Baye. »

(...) Il faudra donc tout l'entregent des producteurs, Frederic Niedermeyer (Moby Dick Films) et Pascal Caucheteux (Why Not productions), pour rendre le film possible. Deux ans d'efforts pour boucler un financement modeste, 2 millions d'euros, obtenu grâce à l'avance sur recettes et l'apport conjugué des chaînes France 2, Canal Plus et TPS Star. La présence de Nathalie Baye, plus encore sa forte implication, permettent de surcroît une sortie décente assurée par le distributeur Studio Canal, avec environ quatre-vingts copies".

Enfin il est là et c'est au final ce qui est important car ce sont des sujets qui mérite que l'on s'y arrête mais aussi qu'il soit diffusé pour informer, pour prévenir ce type de situation...