Le photographe, tomes 1, 2 et 3 / by herwannperrin

  
 
Voilà une bande dessinée que pleins d’a priori stupides j’avais mis de côté, sans doute car à cheval entre images et dessins ; le mariage ne me semblait pas être un bon mélange, j’avais plus que tort, c’est un réel délice, enfin le mot je l’avoue est très mal choisi car il s’agit de la mise en bande dessinées de photographies et de dessins d’un vrai reportage datant de 1986 en Afghanistan, le reporter devant effectuer ce travail pour MSF. Le héros, enfin il n’est évidemment pas tout seul est ce reporter de rien du tout qui s’en va partager la vie de cette équipe par delà colline et monts ; ils vont rejoindre un hôpital, enfin ce qui est sensé être un hôpital en temps de guerre dans des endroits où l’eau est un bien plus que précieux.
 
En trois tomes, vous avez l’ensemble du reportage, d’un bout à l’autre de la découverte du pays au départ, en passant par les échanges avec la population, les dangers les interrogations, les conditions de travail harassantes, le peu de moyens, la joie de vivre et une vision de la religion qui semble plus juste avec et en accord avec la réalité des villages, des opérations chirurgicales toutes plus terribles les unes que les autres avec des enfants, des femmes, des hommes qui dès leur plus jeune âge sont marqués par la guerre.
 
C’est aussi, le retour, presque solitaire du reporter qui va devoir affronter ses propres peurs, ses propres démons, c’est moins drôle mais c’est aussi une partie de la vérité vécue et on sent bien que cette émotion admirablement rendue dans les planches est palpable, véridique. La mort n’est pas loin…
 
Et puis, toujours dans le tome 3, c’est l’apothéose avec le DVD d’une partie de la mission qui vous relate après coups ce que les images vous ont arraché en sentiment car réellement, la réalité de la bande dessinée est transposée et vous prend aux tripes, c’est très dur et triste et au-delà des errements humanitaires qui peuvent parfois avoir lieu, ce sont des hommes, des femmes qui sont dévoués corps et âmes à sauver des vies dans des conditions extrêmes avec des moyens inexistants mais une âme ouverte.
 
En tout cas, à lire avec passion car c’est tout simplement très très réussi dans un genre qui a ma connaissance n’existe pas. C’est touchant de connaître l’histoire de ces personnages qui sont des hommes, des femmes qui sortent de la bande dessinée pour vivre leur vie… sorte de bande dessinée autobiographique avec ses rêves, ses espoirs et ses peurs …
 
C’est de Guibert, Lefèvre et Lemercier
 
Une très bel article dont voici un extrait qui rend bien compte de ce rapport au réel entretenu par la photographie, les voix off et les dessins, une nouvel art est né combinaison et croisement de trois arts majeurs rendant cette proximité avec le réel qui est rare ; aventure magique…
 
« Toutes les photos viennent de planches contact, mais le mouvement de la caméra est remplacé par le dessin avisé et parfaitement maîtrisé de Guibert, la mise en planche de Lemercier et la voix off par les textes de Lefèvre. [2] Le dessin sert ici de passage entre les mots et les photos, isolant par sa nature à la fois symbolique (proche des lettres) et iconique (proche des images) ce qui fait lien narratif, ce qui guide l’œil du lecteur. Entre la nature purement symbolique des mots et celle indiciaire [3] des photos, il n’y a pas ce hiatus qui fait la rigidité de la plupart des romans photos. Ici les mots n’empiètent pas sur le territoire des photos, ils les survolent dans des narratifs jaunes dont les contours ont la taille de cases et qui se font cases parfois. [4] »
 
Lire l’article complet de Jessie Bi sur du9
 
 
Le site très documenté et dédié à la bande dessiné chez Dupuis avec notamment les planches contacts, un diaporama et puis …