Les pirates du capitalisme de Solveig Godeluck et philippe Escande / by herwannperrin



Les pirates du capitalisme ou Comment les fonds d'investissement bousculent les marchés.


La lecture de ce livre de Solveig Godeluck et philippe Escande est très intéressante à plusieurs égards. Elle dresse un panorama assez complet et très accessible de ce sont les fonds, qui sont ils, d'oùviennent-ils, qui est derrière ces géants qui font trembler la planète.

Tout d'abord, lorsque l'on parle des fonds, il est intéressant de noter d'ambler la multitude de formes qu'ils peuvent prendre. Les plus connus sont sûrement les fonds de pension qui reçoivent les économies des salariés et qui font généralement des placements plutôt prudents quoiqu'il faut qu'il puisse avoir sur le long terme de sacré rendement lorsque l'âge de la retraite arrivera et qu'ils devront débourser plus qu'ils n'ont actuellement en fond propres... Viennent ensuite les hedges funds (fond de couverture) plutôt fonds spéculatifs qui sont plus dans une logique d'achat et de revente sur le marché avec plus-value rapide. Il y a également les fonds d'investissement qui sont dans une logique d'achat complet de société par différentes techniques et notamment le Leverage Buy-Out (LBO). Enfin, il y a également, et c'est peut être moins abordé dans ce livre, les fonds souverains qui sont les fonds initiés par les États pour "écouler" le trop plein d'exportations.

Retour sur les raisons de la crise des sub-primes dont nous subissons encore les conséquences, importance des fonds souverains dans le sauvetage de la finance mondiale, crise de confiance, renforcement de la transparence et des mécanismes de régulation, des erreurs de gestion mais globalement il semblerait que dans ce cadre, les fonds ne soient pas vraiment en cause et que même, ils aient en quelque sorte joué un rôle stabilisateur.

Il est vrai que la diversification croissante de participations des différents fonds et les mécanismes mis en place par les Banques tendent à diluer de manière importante les risques en les faisant peser non pas sur un ou quelques acteurs mais sur une multitudes d'entre eux. En effet, les outils financiers mis en place et utilisés permettent mais c'est évidemment à double tranchant de répartir et inclure une partie du risque à un niveau transversal qui en cas de crise permet que tout ne s'effondre pas.

La lente montée des fonds en France s'est faite en plusieurs étapes et la perception a été dure à faire avaler, on se rappelle tous de l'imbroglio lié àGemplus et au fond TPG, ensuite c'est le duo Kohlberg; Kravis & Roberts (KKR) et Wendel alias Ernest-Antoine Seillière et l'entreprise Legrand et bien d'autres entre temps ce qui permet progressivement de faire entrer dans la culture française cette approche. Il reste quelquessoubresauts comme cela a été dernièrement le cas avec Athos lors de l'assemblée générale qui s'est tenu le 23 mai et qui a du être ajournée et qui finalement s'est soldée par un accord avec "les fonds Centaurus et Pardus qui ont mis officiellement fin à leurs hostilités en annonçant un accord sur la composition du conseil de surveillance et une revue de la stratégie du groupe".

Retour sur l'histoire de quelques uns des grands fonds notamment KKR ou Blackstone par exemple, retour également sur les dérives avec par exemple RJR Nabisco mais également LTCM où tout wallstreet a du payer pour qu'il n'y ait pas un effondrement en cascade mais également sur les déboires du fonds Amaranth Advisors en 2006 et de son traders qui a perdu plus de 6 milliards de dollars qui a été absorbé par le système financier mis en place dans lequel au final les paris des spéculateurs s'annulent entre eux...enfin jusqu'en février 2008... et la crise des prêteurs qui ont accordé des crédits immobiliers bien trop risqués... Retour également sur le fonctionnement des fonds et leurs différentes méthodes de participation, d'intégration de la société, de prise en charge du management et des rémunérations très élevés qu'ils touchent et qui font couler tant d'encre. En effet, on notera qu'un rapport intitulé "Private Equity et capitalisme français" du Conseil d'Analyse Economique présenté au Premier Ministre le 15 mai dernier "résume ainsi une partie de ses travaux : investir en capital-investissement dans les fonds à effet de levier ( buy-out) ou dans le capital-risque conduit à une perte moyenne de l'ordre de 25 % des sommes engagées, comparativement à un investissement dans des sociétés cotées. Ces 25 % de perte correspondent presque exactement à la valeur actualisée des rémunérations capturées par le gérant pour le prix de son effort" (Agefi).  Il faudra approfondir celui-ci dès sa parution qui ne saurait tarder... analyse qui ne plaît évidemment pas aux fonds qui contestent cette approche

Bon je crois que je vais m'arrêter là pour aujourd'hui, le mieux étant que vous vous procuriez ce bouquin qui est plus qu'intéressant et très didactique

Pour information, un article d'Ibrahim Warde paru dans le Monde diplomatique de Mai 2008 (n°650) intitulés "Prédateurs, sauveurs ou dupes" revient plus précisément sur le rôle des fonds souverains de manière plus qu'intéressantes et je vous conseille vivement sa lecture en complément du bouquin qui finalement n'aborde pas tellement cet aspects qui va intrinsèquement se développer dans un futur proche et qu'il faudra regarder de manière très critique vu les enjeux qui se cachent derrière lesÉtats qui en sont les acteurs principaux... En effet, un article de Nicolas Baverez dans le journal Le monde en date du 21 mai dernier indiquait " irruption des États sur les marchés dans un rôle d'investisseur à long terme à travers les fonds de pension publics et les fonds souverains qui disposent d'une force de frappe évaluée à 3 500 milliards de dollars et pourraient en gérer 12 500 à l'horizon de 2015. Les fonds souverains sont nés dans les années 1960 et 1970 dans les pétromonarchies afin de recycler les recettes du pétrole (création de Kuwait Investment Authority en 1960, suivi par Abu Dhabi, Oman et Brunei), puis se sont développés en Asie pour investir les excédents de Singapour (fondation de Temasek en 1974 et Singapore Investment Corporation en 1981), imité par la Corée en 2006, la Chine en 2007 (China Investment Corporation dotée de 250 milliards de dollars), puis le Brésil en 2008. A travers eux, les Etats deviennent des opérateurs des marchés financiers, dont ils utilisent les technologies et l'ingénierie. Pour autant, l'adossement à un État leur confère une nature singulière. Ils répondent à des logiques différentes : placement à long terme et préparation de l'après-pétrole pour les monarchies du Golfe ou la Norvège ; reclassement des excédents commerciaux pour les pays émergents d'Asie ; bras armé de l'Etat-FSB en Russie. De même, les stratégies d'investissement sont très variables, allant de la maximisation du rendement financier à la recherche de positions de contrôle dans des secteurs-clés tels les matières premières ou l'énergie".


Voilà, sinon également deux articles plus spécialisés : le monde des hedges funds : préjugé et réalité par Michel Prada, présent de l'Autorité des Marchés Financiers (AMF) ainsi que Montée en puissance des fonds d'investissement étrangers et impact sur la gestion des entreprises industrielles