Van Gogh le suicidé de la société d'Antonin Artaud / by herwannperrin


Il est de ces auteurs qui artistes eux-mêmes vont au delà des apparences et au delà de la critique elle même, qui écrivent des moments d'Arts tout simplement; c'est un de ces moments unique que nous livre ici Antonin Artaud avec tout la simplicité de sa langue qui se délie et nous emmènes dans les contrées sauvages et réelles de l'artiste à la découverte d'un de ses semblables. Nul doute que la préfaced'Evelyne Grossman soit intéressante mais ce sont les propos d'Antonin Artaud qui sont là et qui vous porte vers l'univers de Van Gogh. Des descriptions et des moments où tout vascille et où le génie apparaît, hommage à un peintre de l'absolu par un autre homme venu d'un autre monde, de l'ailleurs tout à la fois poétique et en finesse, il y a des livres qui ne peuvent que vous marquer et auquel vous reviendrez pour des brins de phrases.

C'est plus qu'une Invitation à la lecture de ce bel essai....

"Je ne décrirai donc pas un tableau de Van Gogh, mais je dirai que Van Gogh est peintre parce qu'il a recollecté la nature, qu'il l'a comme retranspirée et fait comme suer, qu'il a fait gicler en faisceaux sur ses toiles, en gerbes comme monumentales de couleurs de couleurs, le séculaireconcassement d'éléments, l'épouvantable pression élémentaire d'apostrophes, de stries, de virgules, de barres dont on ne peut plus croire après que les aspects naturels ne soient faits (...) Il n'y a pas defantômes dans les tableaux de van Gogh , pas de visions, pas d'hallucinations. C'est de la vérité torride d'un soleil de deux heures de l'après-midi. Un lent cauchemargénésique petit à petit élucidé. sans cauchemar et sans effet. mais la souffrance du pré-natal y est. "

Plus loin, on lira également ce passage magnifique et si  réel

"Ces corbeaux peints deux jours avant sa mort ne lui ont, pas plus que ses autres toiles, ouvert la porte d’une certaine gloire posthume, mais ils ouvrent à la peinture peinte, ou plutôt à la nature non peinte, la porte occulte d’un au-delà possible, d’une réalité permanente possible, à travers la porte par VanGogh ouverte d’un énigmatique et sinistre au-delà. Il n’est pas ordinaire de voir un homme, avec, dans le ventre, le coup de fusil qui le tua, fourrer sur une toile des corbeaux noirs avec au-dessous une espèce de plaine livide peut-être, vide en tout cas, où la couleur lie-de-vin de la terre s’affronte éperdument avec le jaune sale des blés. Mais nul autre peintre que VanGogh n’aura su comme lui trouver, pour peindre ses corbeaux, ce noir de truffes, ce noir "de gueuleton riche" et en même temps comme excrémentiel des ailes des corbeaux surpris par la lueur descendante du soir."

En ce moment, il a l'exposition Antonin Artaud à la BNF; elle est somptueuse tout simplement